Les épendymomes sont un groupe de tumeurs gliales dérivant des cellules de la muqueuse épendymaire, qui tapissent le système ventriculaire du cerveau et le canal central de la moelle épinière. Ces tumeurs peuvent se localiser dans différentes parties du système nerveux central (SNC), le plus souvent dans la fosse postérieure et la moelle épinière. L’approche moderne des épendymomes repose sur une résection chirurgicale maximale de la tumeur, suivie d’une radiothérapie. Les caractéristiques anatomiques, histologiques et moléculaires-génétiques de la tumeur influencent le pronostic.Épendymome infratentoriel du cerveau – Modèle 3D
Étiologie
Les causes précises du développement des épendymomes ne sont pas établies.
Plusieurs mécanismes influencent l’apparition de la tumeur :
Altérations génétiques: les épendymomes présentent souvent des modifications de la structure de l’ADN, telles que des déséquilibres chromosomiques (par exemple, gain chromosomique +1q), des fusions de gènes (par exemple, fusions ZFTA-RELA), des délétions et des mutations entraînant l’activation de voies oncogéniques et la suppression des mécanismes de contrôle de la croissance cellulaire.
Altérations épigénétiques (modifications de l’activité des gènes) : la dérégulation du méthylation de l’ADN et des histones est particulièrement importante, par exemple la perte de la triméthylation H3K27me3 dans le groupe PF-EPN-A, qui inhibe l’expression des gènes responsables de la différenciation.
Facteurs héréditaires: une association entre certains épendymomes spinaux et la schwannomatose liée à NF2 (NF2) est observée.
Ainsi, l’épendymome résulte d’une interaction complexe entre des processus génétiques et épigénétiques, entraînant une perturbation du contrôle cellulaire et une prolifération excessive.
Épidémiologie
Les épendymomes sont diagnostiqués à tout âge, avec un pic d’incidence dans la petite enfance (médiane de 5 ans).
Chez les enfants, 90 % des épendymomes se situent dans le cerveau, principalement dans la fosse postérieure.
Chez les adultes, l’incidence globale est plus faible ; 65 % des cas concernent la moelle épinière.
Manifestations cliniques
Les symptômes des épendymomes dépendent de leur localisation.
Tumeurs supratentorielles (au-dessus de la tente du cervelet) : crises convulsives, manifestations neurologiques focales (troubles du langage, modifications de la personnalité et du comportement, diminution de la mémoire et de l’attention, hémiparésies), symptômes cérébraux généraux (céphalées, nausées, vomissements, œdème du disque optique).
Ventricules latéraux – site typique d’apparition des épendymomes supratentoriaux
Tumeurs infratentorielles (fosse postérieure) : signes d’hypertension intracrânienne (hydrocéphalie – céphalées, nausées, vomissements), ataxie (troubles de la coordination des mouvements et instabilité), atteintes des nerfs crâniens (dysarthrie, dysphagie, baisse de l’audition).
Animation 3D – Épendymome infratentoriel
Épendymomes spinaux : douleurs dorsales, douleurs radiculaires, faiblesse musculaire progressive, troubles des fonctions pelviennes (troubles de la miction et de la défécation, parfois impuissance).
Site d’apparition des épendymomes spinaux
Classification des épendymomes
Les épendymomes sont classés selon leurs caractéristiques anatomiques, histologiques et moléculaires.
En 2021, l’OMS a introduit des modifications importantes dans la classification des épendymomes, mettant en évidence de nouvelles caractéristiques moléculaires cruciales pour le pronostic et la personnalisation du traitement.
Les données moléculaires complètent de manière significative la classification histologique traditionnelle des épendymomes et permettent de personnaliser le traitement et d’améliorer le pronostic.
Classification anatomique avec caractéristiques moléculaires (OMS 2021)
Selon la classification des tumeurs du SNC de l’OMS 2021, 10 types de tumeurs épendymaires sont distingués :
Épendymome supratentoriel (ST-EPN) :
Épendymome supratentoriel non précisé (ST-EPN-NOS/NEC);
Épendymome supratentoriel ZFTA fusion-positive ;
Épendymome supratentoriel YAP1 fusion-positive.
Fosse postérieure (PF-EPN) :
Épendymome de la fosse postérieure non précisé (PF-EPN-NOS/NEC) ;
Épendymome de la fosse postérieure, groupe A ;
Épendymome de la fosse postérieure, groupe B.
Épendymome spinal (SP-EPN) :
Épendymome spinal ;
Épendymome spinal MYCN-amplifié.
Épendymome myxopapillaire ( MEPN). Souvent localisé dans la partie caudale de la moelle épinière.
Subépendymome (SubEPN). Souvent localisé dans le quatrième ventricule et les ventricules latéraux.
Classification des épendymomes avec caractéristiques
Moins fréquent, pronostic plus favorable, souvent chez les nourrissons
Épendymome supratentoriel non précisé (ST-EPN-NOS/NEC)
2 ou 3
Mutations hétérogènes, non classifiable (NEC) ou sans précision moléculaire (NOS)
Groupe hétérogène, pronostic et thérapie nécessitant des recherches supplémentaires
Épendymome de la fosse postérieure, groupe A (PF-EPN-A)
–
Perte de H3K27me3 ; souvent +1q
Agressif, mauvais pronostic, principalement chez les nourrissons et les enfants
Épendymome de la fosse postérieure, groupe B (PF-EPN-B)
–
Instabilité chromosomique, préservation de H3K27me3
Bon pronostic, patients plus âgés (les adolescents et les adultes)
Épendymome de la fosse postérieure non précisé (PF-EPN-NOS/NEC)
2 ou 3
Morphologiquement épendymome de la fosse postérieure, non classifiable (NEC) ou sans précision moléculaire (NOS)
Diagnostiqué selon la localisation et les caractéristiques histologiques classiques ; pronostic individuel, dépendant du degré de résection et de l’évolution clinique
Épendymome spinal
2 ou 3
Pas de marqueurs moléculaires clairs, souvent pertes chromosomiques sur 22q (où se trouve le gène NF2)
Souvent dans la partie caudale de la moelle épinière, récidives locales, guérison possible après chirurgie et radiothérapie
Subépendymome (SubEPN)
1
Généralement sans mutations agressives, bénin, mutation TERT possible
Toute partie du système ventriculaire et de la moelle épinière, croissance lente, souvent découverte fortuite, pronostic favorable
Principe de détermination du grade de malignité OMS
Les épendymomes ont généralement un grade OMS II-III. Plus le grade est élevé, plus la tumeur est maligne et le pronostic plus sombre.
Selon la mise à jour de la classification OMS des tumeurs du SNC de 2021, pour les nouveaux types d’épendymomes définis moléculairement, tels que YAP1-fusion positive (ST-EPN-YAP1), ZFTA-fusion positive (ST-EPN-ZFTA), PF-A et PF-B, aucun grade n’est attribué. Le grade (degré de malignité — grade 1, 2 ou 3) reste recommandé uniquement pour les épendymomes classiques (y compris ceux définis morphologiquement mais non précisés moléculairement — « NEC/NOS »).
Définitions NOS et NEC :
NOS (Not Otherwise Specified) — « non précisé » : ce terme est utilisé lorsque les tests moléculaires/génétiques ou autres nécessaires n’ont pas été réalisés (ou sont impossibles à réaliser), et le diagnostic repose uniquement sur des critères morphologiques de base. Exemple : si une tumeur cérébrale correspond à l’histologie classique d’un épendymome, mais que le sous-groupe moléculaire (par exemple, ZFTA-fusion, YAP1-fusion, PF-A, PF-B) n’a pas été déterminé ou que l’analyse est inadéquate, le diagnostic sera « épendymome supratentoriel, NOS » ou « épendymome de la fosse postérieure, NOS ».
NEC (Not Elsewhere Classified) — « non classé ailleurs » : ce terme est utilisé lorsque la tumeur est entièrement décrite, que tous les tests modernes ont été effectués, mais qu’elle ne correspond à aucun des sous-types ou groupes standardisés connus. Exemple : si une tumeur répond aux critères d’un épendymome, que des examens morphologiques et moléculaires complets ont été réalisés, mais qu’elle ne correspond à aucun sous-type moléculaire décrit (par exemple, ni ZFTA, ni YAP1, ni PF-A/PF-B), le diagnostic sera « épendymome, NEC ».
Les épendymomes métastasent au sein du SNC, en disséminant des cellules modifiées via la circulation du liquide céphalorachidien.
Diagnostic des épendymomes
Imagerie par résonance magnétique (IRM)
L’IRM du cerveau et de la moelle épinière avec rehaussement de contraste est la base du diagnostic.
Les épendymomes supra- et infratentoriels contiennent généralement des calcifications et des composantes kystiques, avec des hémorragies et un rehaussement hétérogène du signal IRM.
À l’imagerie, les épendymomes sont généralement hypointenses en T1 et hyperintenses en T2, souvent avec un rehaussement marqué au contraste.
Les épendymomes spinaux sont moins souvent calcifiés et peuvent présenter un signal T2 hypointense en raison du dépôt d’hémosidérine – « signe du cap ».
Les épendymomes myxopapillaires sont généralement isointenses en T1 et hyperintenses en T2 par rapport aux tumeurs spinales.
Cytologie du liquide cérébrospinal
L’analyse cytologique du liquide céphalorachidien est importante pour le bilan d’extension et est généralement réalisée après la chirurgie (notamment pour préciser l’étendue de la radiothérapie postopératoire).
Examen histologique
La confirmation histologique par résection tumorale est obligatoire. L’échantillon tumoral obtenu lors de l’opération est examiné au microscope pour déterminer le type de tumeur et son degré de malignité.
Diagnostic différentiel
Dépend de la localisation :
En région supratentorielle : gliomes, tumeurs embryonnaires, tumeurs du plexus choroïde.
En fosse postérieure : médulloblastome, astrocytome pilocytaire, tumeurs du plexus choroïde.
Dans la moelle épinière : astrocytome spinal, schwannome, méningiome.
Traitement des épendymomes
Traitement chirurgical
La résection chirurgicale est la principale méthode de traitement des épendymomes.
Une résection maximale de la tumeur est un facteur critique pour le pronostic. La chirurgie nécessite une grande expertise en raison de la proximité des structures vitales.
En cas d’hydrocéphalie, des interventions de dérivation peuvent être réalisées pour prévenir l’accumulation excessive de liquide céphalorachidien dans les ventricules cérébraux.
En raison de la localisation des épendymomes, une résection radicale est souvent difficile à obtenir (risque élevé de complications). Dans ces cas, la radiothérapie postopératoire devient essentielle.
Radiothérapie
La radiothérapie postopératoire améliore la survie sans progression.
Elle est généralement indiquée en cas de résection subtotale de la tumeur.
En cas de dissémination, une radiothérapie crânio-spinale est recommandée.
Des techniques spécifiques de radiothérapie (IMRT, thérapie par protons) minimisent les dommages aux tissus sains.
Chimiothérapie
Son efficacité est limitée ; elle est principalement utilisée chez les enfants de moins de 1 à 1,5 ans pour retarder la radiothérapie, ou en cas de récidive lorsque la chirurgie ou la radiothérapie ne sont pas possibles. Les agents utilisés incluent le cisplatine, le carboplatine, le cyclophosphamide, l’étoposide et le méthotrexate.
Chez les enfants de plus de 1 an et les adultes, le rôle de la chimiothérapie est limité en raison de la faible sensibilité des épendymomes à la plupart des cytostatiques. Dans de rares cas, elle peut être recommandée pour les récidives ou lorsque les autres traitements ne sont pas réalisables.
Thérapies ciblées et immunothérapie
Des données expérimentales existent sur les thérapies ciblées basées sur le profil moléculaire (par exemple, inhibiteurs d’EGFR et de VEGF), mais leur application clinique est limitée et nécessite des recherches supplémentaires.
Retrouvez d’autres contenus scientifiquement exacts sur nos médias sociaux
Abonnez-vous et ne manquez pas les dernières ressources
Pronostic et suivi
La survie dépend de l’âge du patient, du degré de résection, du sous-type moléculaire de la tumeur et de la présence de dissémination.
Avec une résection complète et une thérapie adéquate, la survie à 5 ans chez les enfants dépasse 70 %.
Chez les adultes, le pronostic dépend également du type de tumeur et est généralement favorable en cas de résection totale et de radiothérapie ultérieure.
Un suivi à long terme avec IRM régulière pendant au moins 5 ans est nécessaire pour détecter les récidives tardives.
FAQ
1. Qu’est-ce qu’un épendymome et où peut-il se localiser ?
L’épendymome est une tumeur gliale du système nerveux central, se développant à partir des cellules tapissant les ventricules cérébraux et le canal central de la moelle épinière. Chez les enfants, jusqu’à 90 % des épendymomes se situent dans le cerveau (principalement dans la fosse postérieure), tandis que chez les adultes, jusqu’à 65 % des cas concernent la moelle épinière.
2. Quels sont les symptômes caractéristiques de l’épendymome ?
Les symptômes dépendent directement de la localisation de la tumeur. En cas d’atteinte cérébrale, peuvent survenir des signes d’hypertension intracrânienne (céphalées, nausées), des crises convulsives, une ataxie (trouble de la coordination) et un déficit neurologique focal. Pour l’épendymome de la moelle épinière, y compris la région de la queue de cheval, sont caractéristiques les douleurs dorsales, la faiblesse musculaire des jambes et les troubles des fonctions pelviennes (problèmes de miction et de défécation).
3. L’épendymome est-il un cancer ou une tumeur bénigne ?
Les épendymomes forment un groupe large de tumeurs. Il existe des variantes à croissance lente et bénignes (par exemple, subépendymome, grade OMS I), mais la majorité des épendymomes sont de grade II-III et considérés comme malins. La classification moderne de l’OMS met l’accent sur les caractéristiques moléculaires, qui déterminent plus précisément le degré de malignité et le pronostic.
4. Comment traite-t-on l’épendymome ?
Le traitement repose principalement sur la résection chirurgicale complète de la tumeur. Comme une résection radicale n’est pas toujours possible, la radiothérapie postopératoire est un élément clé pour améliorer le contrôle de la maladie. Le rôle de la chimiothérapie est limité : elle est principalement utilisée chez les jeunes enfants pour retarder l’irradiation, ou en cas de récidive lorsque les autres options sont épuisées.
5. Quel est le pronostic des épendymomes et quelle est l’espérance de vie des patients ?
Le pronostic et l’espérance de vie varient considérablement selon le sous-type moléculaire de la tumeur, l’âge du patient et, surtout, l’étendue de la résection chirurgicale. Avec une résection totale et un traitement approprié, la survie à 5 ans chez les enfants dépasse 70 %. Chez les adultes, le pronostic est également généralement favorable avec un traitement adéquat. Cependant, les sous-types moléculaires agressifs, tels que PF-EPN-A chez les enfants ou l’épendymome spinal MYCN-amplifié, présentent un pronostic plus sombre.
Références
1.
Catalogue VOKA. [Ressource électronique]
https://catalog.voka.io/
2.
Upadhyaya, S. A., Tinkle, C. Intracranial ependymoma and other ependymal tumors [Épendymome intracrânien et autres tumeurs épendymaires]. UpToDate. 2023
3.
Kresbach, C., Neyazi, S., & Schüller, U. Updates in the classification of ependymal neoplasms: The 2021 WHO Classification and beyond [Mises à jour dans la classification des néoplasmes épendymaires : La classification OMS 2021 et au-delà]. Brain Pathol. 2022 Jul;32(4):e13068. doi: 10.1111/bpa.13068. Epub 2022 Mar 21. PMID: 35307892; PMCID: PMC9245931.
4.
Mu, W., & Dahmoush, H. (2023). Classification and neuroimaging of ependymal tumors [Classification et neuroimagerie des tumeurs épendymaires]. Front Pediatr. 2023 May 23;11:1181211. doi: 10.3389/fped.2023.1181211. PMID: 37287627; PMCID: PMC10242666.
5.
Mack, S. C., Witt, H., Pajtler, K. W., et al. Therapeutic targeting of ependymoma as informed by oncogenic enhancer profiling [Ciblage thérapeutique de l’épendymome basé sur le profilage des amplificateurs oncogéniques]. Nature. 2018;553(7686):101-5.
6.
Parker, M., et al. C11orf95-RELA fusions drive oncogenic NF-kB signalling in ependymoma [Les fusions C11orf95-RELA induisent une signalisation NF-kB oncogénique dans l’épendymome]. Nature. 2014;506(7489):451-5.
7.
Yamaguchi, J., et al. Latest classification of ependymoma in the molecular era and advances in its treatment: a review [Dernière classification de l’épendymome à l’ère moléculaire et avancées dans son traitement : une revue]. Jpn J Clin Oncol. 2023;53(8):653-663.
8.
Merchant, T. E., et al. Conformal radiotherapy after surgery for paediatric ependymoma: overall survival and toxicity [Radiothérapie conformationnelle après chirurgie pour l’épendymome pédiatrique : survie globale et toxicité]. Lancet Oncol. 2009;10(3):258-66.
9.
National Comprehensive Cancer Network (NCCN). (2024). CNS Cancers Guidelines [Lignes directrices sur les cancers du système nerveux central].
10.
Tsang, D. S., et al. Reirradiation for recurrent pediatric intracranial ependymoma [Réirradiation pour l’épendymome intracrânien pédiatrique récurrent]. Int J Radiat Oncol Biol Phys. 2018;100(2):507-514.